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La double vie de Bru


Guest Xv-31

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Guest Xv-31

C'était lundi soir.

Une jolie fin de journée sur le stade Ernest-Wallon, vide et non sans charme. On avait discuté longuement avec Yannick Bru de son activité de chef d’entreprise et en fin d’entretien on lui apprit les intentions du Stade Français qui entendait le citer, ainsi que Grégory Lamboley.

L’affaire s’étant arrangée hier sans dommages pour les deux joueurs toulousains. Passé la stupéfaction, il concédait : « C’est exactement le genre de circonstances où il est important d’avoir une activité en dehors du rugby, de pouvoir penser à autre chose. »

Il avait hésité avant d’accepter de parler de cette autre partie de lui-même. Par pudeur. Parce que Yannick Bru n’est pas un homme d’ego. Il est talonneur, c’est-à-dire plutôt enclin à faire don de sa personne plutôt qu’à l’exposer. Et puis il ne voulait pas avoir l’air de faire sa publicité. Mais on a insisté car c’est de plus en plus rare d’avoir un chef d’entreprise qui emmène l’équipe dont il est capitaine en finale du Top 14. Le professionnalisme qui date de 1995 réduit chaque saison un peu plus le nombre de ces parcours qui, pourtant, ont fait la singularité et donc la richesse de ce sport. Soit des sportifs ancrés dans le réel et non des stars évanescentes coupées dela société civile. Mais pour Bru cela ne s’est pas posé en termes de choix.

« En revenant de la Coupe du monde en 2003, j’avais trente ans. Et je me suis posé la question de ce

que je voulais faire après le rugby. Car même si aujourd’hui tous les clignotants sont au vert pour le rugby en

termes de recrudescence de sponsors, de spectateurs, d’image, il faut être conscient qu’il n’y a qu’une petite

dizaine de cadres de l’équipe de France qui peuvent envisager l’après rugby sereinement. L’idée était donc

de créer une structure pérenne qui pourrait m’accueillir après ma carrière.»

Les contradictions du rugby

Bru était alors diplômé de l’école supérieure de commerce de Toulouse. Spécialité : finance. « J’avais

travaillé dans la banque, mais je ne me voyais pas derrière un bureau, cela ne me correspondait pas. Et surtout, je tenais à mon indépendance. J’ai choisi ainsi de créer une société autour de la finance et du sport. » Le rôle de celle-ci, qui emploie désormais trois salariés, consiste à conseiller les sportifs dans la gestion

de leur patrimoine. « Je me suis dit que je connaissais cette problématique-là, je savais les besoins, les

soucis auxquels étaient confrontés les sportifs de haut niveau. » Ces derniers sont souvent victimes de

personnes mal intentionnées, et surtout ils n’ont ni le temps ni les compétences pour s’occuper de ce

domaine. Les clients de la société de Yannick Bru sont à 75 % des rugbymen et 20 % des footballeurs, le

reste vient des autres sports. Il leur apporte une expertise juridique, comptable, fiscale… Cette aventure

est également née de rencontres, avec par exemple le centre de L’USAP, Christophe Manas, ou

encore l’ancien gardien de but Dominique Casagrande. « Au début, raconte Bru, le Stade Toulousain et

Guy Novès ont été compréhensifs. Car créer une entreprise demande beaucoup d’énergie et les premières

années ont été très prenantes. Aujourd’hui, je me suis organisé. Car le rugby reste mon principal employeur et je sais que c’est grâce à lui que j’ai pu faire ça. Mais l’énergie que je dépense dans cet engagement me semble largement compensée par l’oxygène qu’elle m’apporte. Et mon exemple n’est pas unique,

Serge Betsen se trouve dans la même configuration à Biarritz. » L’équilibre que s’est ainsi créé le talonneur toulousain n’est certainement pas étranger à sa réussite sportive. « L’enfermement dans lequel se trouve le sportif professionnel n’est pas sain, convient-il. Quand on ne se consacre qu’au rugby, dès que cela ne va pas, on broie du noir, on est désagréable à la maison. » Sans compter la chimère que constitue

actuellement le rugby professionnel. « L’équation dans notre sport est actuellement difficile à résoudre pour les joueurs. Notre sport est excessivement exigeant mentalement et physiquement en contrepartie d’une rémunération qui ne justifie pas ces sacrifices. Le rapport avec le football en termes de rémunération est de 1 à 8. C’est extrêmement difficile pour un jeune actuellement qui aspire au très haut niveau et qui veut donc se donner tous les moyens de réussir et qui voudrait avoir une activité extra-sportive intense. » La question est en effet fondamentale et les dirigeants du rugby en ont conscience. À la Ligue comme au Stade Toulousain, oùle centre de formation tente de résoudre cette contradiction. Celle-ci se pose avec insistance dans des clubs moins structurés. « Notre sport connaît un certain succès, explique Bru, notamment parce que l’on y rencontre des personnages riches d’un parcours.

Or, le risque consiste avec ce moule du professionnalisme à produire des joueurs formatés et qu’à terme notre sport ne renvoie plus cette image qui a fait son succès. »

JEAN-CHRISTOPHE COLLIN

Journal L'Equipe du 7/06

:smile:

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Tres sympa cet article, decidement un vrai homme de tete !

et c'est pas Labrousse qui nous dira le contraire...

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Un 3è bouclier pour Yannick, ça aurait de la gueule dans le bureau... : whist Surtout, que là, il est capitaine !!!!!!! :smile:

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